Ministère de la langue kabyle, de l’enseignement, de la recherche scientifique et de la formation
Des faux chiffres pour gaver Tizi-Ouzou. Après la bulle des succès au baccalauréat dont nos enseignants et nos enfants sont les seuls héros, le programme est catastrophique, le ministère de l’éducation nous jette une volée de chiffres, à la manière du bois vert, concernant l’enseignement de Tamazight.
« Et l’on pavoise et l’on rit, on a gagné nos paris ! », ai-je déjà dit dans mes écrits antérieurs à ceux qui se contentent de miettes. En effet, on nous présente la couverture de 80% du cycle primaire en enseignement de « Tamazight », dans la Wilaya de Tizi-Ouzou, comme une prouesse !
Ce chiffre, s’il est atteint, est à mettre à l’actif de la Kabylie qui réclame cet enseignement et non à celui du Ministère qui, non content de le saboter se met à s’en attribuer indûment les honneurs. Dans un pays où le bourrage des urnes est une pratique courante, la falsification et la manipulation des statistiques pour leur faire dire des contrevérités est jeu d’enfant dans lequel le régime algérien est passé maître.
Quand bien même, on validerait ces 80%, que signifie-t-il en soi ? Est-ce nécessaire de rappeler qu’il ne s’agit là que d’une Wilaya sur les six que compte la Kabylie et d’un cycle sur trois (abstraction faite de l’université) ?
Mais pendant qu’on est aux chiffres, voyons les paramètres en mesure de leur conférer la valeur qu’ils méritent.
1) On ne peut tout de même pas oublier que ce résultat est en fait le fruit de près de 50 ans de lutte, de centaines de morts, de veuves et d’orphelins, de milliers de handicapés de toutes sortes, de prisonniers, de torturés et d’exilés.
2) Aussi, faut-il rappeler que les cours de tamazight, arrachés au prix d’une année de boycott scolaire kabyle (1994-95) sont toujours facultatifs ? Que les enseignants de cette discipline demeurent sans statut et très mal payés pour les décourager d’exercer ? Les grèves de la faim qu’ils observent chaque année depuis 7 ans en sont autant de preuves et de témoins du mépris et de la volonté d’assassiner cet enseignement des langues d’origine amazighe.
3) Persister dans la terminologie de « langue amazighe » participe d’une autre mystification visant à occulter LA LANGUE KABYLE.
Si l’on examine cet enseignement sur le plan purement psychologique, il est légitime de se demander d’où l’enfant tirerait sa motivation pour une matière qui compte si peu dans la hiérarchie des langues mises en compétition devant lui ! Le professeur est presque inexistant. Une langue pour laquelle il n’y a ni évaluation ni promotion scolaire ne déclenche pas de ruée vers l’or chez les élèves. Ceux parmi eux qui s’en préoccupent méritent des médailles. Il en est de même pour le professeur qui enseigne une matière que le Ministère refuse de valoriser et offrant aux enseignants un statut peu reluisant.
Sur le volet fonctionnel, il est tout simplement impensable de faire évoluer la qualité d’un produit ou d’un service dont le processus d’élaboration n’est sujet ni à contrôle, ni à suivi ni à reddition de compte. C’est précisément le sort de tout ce qui est facultatif comme l’enseignement de « tamazight » et dont, malgré tout, le taux de fréquentation à l’échelle de l’Algérie est inexistant en dehors de la Kabylie qui totalise à elle seule pas moins de 95% .
Tant d’années de lutte et de sacrifices kabyles ne seraient-elles honorées que par cette mascarade des chiffres et non des faits et des actes ? La mémoire des poètes de Si Mohand w Mhend, Si Lvacir Amellah jusqu’à Matoub, des intellectuels de Boulifa, Mammeri jusqu’à Muhia, des combattants de Cix Aheddad, Fadma n Sumer à Amirouche ne sera jamais valorisée que par une école kabyle et sous un gouvernement kabyle.
Il appartient à la génération charnière qui est la nôtre d’évacuer tous ces leurres, de voir avec plus d’acuité et de discernement notre réalité pour mieux garantir non seulement la pérennité de notre langue mais aussi son véritable développement.
Il est capital de réaliser immédiatement que le pouvoir d’Alger n’est pas là pour officialiser notre langue mais pour la faire disparaître.
Le ministre en charge de la langue Kabyle au sein de l’Anavad est convaincu qu’il n’y a d’autre issue pour cette dernière que l’autonomie régionale.
Pour cela, il appelle tous les kabyles, au sein ou en dehors du MAK, à collaborer à l’édification de l’académie de langue kabyle et de toutes les institutions devant l’accompagner pour amorcer tous ensemble l’autonomie de la Kabylie.
Montréal le 19/09/2010
Mass Lhassen U ziyan
Ministre en charge de la langue Kabyle et de l’éducation au Gouvernement Provisoire Kabyle, l’Anava